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ROME : Procès EternitLa Cour de cassation bafoue la Justice au nom du DroitLe 19 novembre elle a annulé sans renvoi l’arrêt de la Cour d’appel de Turin qui « Vergogna ! » (Honte à vous !), c’est par ce cri que les victimes de l’amiante, massées dans la salle d’audience ont accueilli l’impensable verdict de la plus haute juridiction italienne. 3000 victimes sans coupable !Hier encore, la justice italienne donnait l’exemple. Le 19 novembre, la cour de cassation a annulé sans renvoi l’arrêt de la Cour d’appel pour la totalité des dossiers. Comment des morts à venir peuvent-ils être prescrits ?Le délai de prescription prévu par le Code pénal italien est de 12 ans. La défense de Schmidheiny a estimé que le point de départ de ce délai était la fermeture de l’entreprise Eternit en 1986. Toutes les maladies survenues après 1998 sont donc prescrites, avant même d’avoir existé ! A Rome, le lendemain du procès se tient une conférence de presse organisée par l’Afeva et les trois confédérations syndicales avec des associations de victimes d’une dizaine de pays. « Je n’ai pas pleuré à l’annonce du verdict, explique Romana Blasotti Pavesi, la présidente de l’Afeva. Je n’ai ni haine ni désir de vengeance. Je souhaite simplement que Schmidheiny, qui se prétend innocent vienne nous le dire en face, à Casale, les yeux dans les yeux », ajoute Romana qui a perdu 5 membres de sa famille, tués par l’amiante d’Eternit. « J’ai 85 ans. Je mène ce combat depuis plus de 35 ans. Je continuerai, parce qu’il n’est pas possible que des personnes qui font mourir d’autres personnes pour gagner de l’argent ne soient pas punies. Ce verdict est une injure à nos souffrances et une honte pour l’Italie. Copi, son avocat n’a exprimé aucune compassion pour les victimes. Schmidheiny échappe cette fois-ci à la justice, mais je ne veux pas penser que nous avons subi une défaite. Je peux me regarder dans la glace et vivre en paix avec moi-même. Pas lui. Nous ne lui laisserons pas de répit. Ce procès a été un formidable encouragement pour les victimes de l’amiante du monde entier. Nous trouverons la force de surmonter notre chagrin, notre rage et notre colère et de reprendre notre combat pour la justice. » Bruno Pesce, coordonnateur de l’Afeva, montre l’absurdité de ce verdict : « Imaginons que quelqu’un pose une bombe à retardement et qu’elle explose un jour après le délai de prescription de 12 ans. Si l’on suit la cour de cassation, il sera bien responsable d’une catastrophe mais il sera impossible de le condamner !... Nicola Pondrano, dénonce le cynisme des avocats de Schmidheiny qui espèrent que la cour de cassation mettra un point final aux « persécutions judiciaires » des magistrats italiens contre le milliardaire suisse. Une malheureuse « victimes des victimes » en quelque sorte... Les représentants des trois confédérations syndicales d’Italie (CGIL, UIL, CISL) ont tenu à être présents. Ils soulignent la gravité de ce verdict non seulement pour les victimes de l’amiante mais aussi pour l’ensemble des victimes du travail atteints par des cancers professionnels. Tous apportent leur soutien sans réserve à l’Afeva. L’ARTICLE 434 DU CODE PÉNAL ITALIENIl punit d’une peine de 1 à 5 ans de prison l’auteur d’actes susceptibles de provoquer une catastrophe mettant en danger la santé publique. Si cette catastrophe se réalise, la peine est de 3 à 12 ans de prison. la solidarité internationale DES ASSOCIATIONS de VICTIMESVenues de France, de Belgique, de Grande-Bretagne, de Suisse, du Brésil, d’Argentine, des États-Unis et du Japon, des délégations internationales ont assisté à l’audience de la cour de cassation. UNE VAGUE D’INDIGNATIONToute la presse italienne dénonce très durement ce verdict qualifié de « sinistre farce ». Elle fait ses gros titres du cri poussé par les familles à l’écoute de la sentence : « Vergogna ! » (Honte à vous !). Les quotidiens publient des interviews poignants de victimes et de veuves. Article paru dans le Bulletin de l’Andeva n°47 (janvier 2015) |