Association Nationale de Défense des Victimes de l'Amiante

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Projet de loi de financement de la Sécurité Sociale pour 2002

15 octobre 2001
Auteur(e) : 

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ANDEVA

Association Nationale de Défense des Victimes de l’Amiante

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Projet de loi de financement de la
Sécurité Sociale pour 2002

Plate-forme

Depuis plus de dix ans, les rapports se
succèdent faisant apparaître l’injustice que
constitue un système de réparation des maladies
professionnelles qui indemnise dans des conditions très
défavorables si on compare cette indemnisation avec celle
d’autres victimes d’accidents ou d’infractions.
Le récent rapport rédigé par R. Masse, ainsi
que deux relevés de conclusions provisoires de la cour de
comptes - courant 2001 - mettent une fois de plus
l’accent non seulement sur cette injustice mais aussi sur les
dysfonctionnements persistants du système de
réparation, dysfonctionnements qui conduisent à
exclure de la réparation la majeure partie des victimes de
maladie professionnelle.

La réparation intégrale est
désormais inscrite dans la loi pour ce qui concerne les
victimes de l’amiante mais le Fonds n’est pas encore
créé et ne se substituera pas à la
reconnaissance des maladies professionnelles.

Madame Guigou s’est prononcée en faveur
du principe de réparation intégrale pour toutes les
victimes du travail. Encore faut-il que les procédures
d’accès à ce droit en permettent
l’effectivité.

Au-delà des déclarations d’intention,
l’adoption dès cette session parlementaire d’un certain
nombre de mesures immédiates serait un gage de la
détermination réelle du gouvernement à avancer
dans cette voie.

Pour l’ANDEVA, les mesures les plus urgentes
concernant la réparation des maladies professionnelles sont
les suivantes :

1) Egalisation des taux de rente et du taux
d’incapacité.

L’article R434-2 du Code de la
sécurité sociale deviendrait : " la
rente à laquelle a droit la victime en application du
2 e alinéa de l’article L434-2 est
égale au salaire annuel multiplié par le taux
d’incapacité ".

Exposé des motifs

Actuellement pour 90% des victimes, le taux de rente
est égal à la moitié du taux
d’incapacité.

Le principe de la réparation forfaitaire est
issu d’un long débat préalable à
l’adoption de la loi de 1898 sur les accidents du travail. Il
ne s’agit pas de le reprendre ici, d’autant que les
rapports pré-cités en font l’analyse et en
montrent l’inadaptation dans le contexte actuel
d’indemnisation lié à l’essor de
l’assurance. Cependant on peut en souligner le
caractère injuste non seulement au regard des autres
catégories de victimes bénéficiant de
l’automaticité de l’indemnisation (accidents de
la route, victimes du sida) mais aussi parce qu’il
s’appuie sur un principe de partage de la
responsabilité du risque d’accident ou de maladie
entre employeur et travailleurs. Or, à
l’évidence, les millions de travailleurs
exposés à l’amiante depuis des décennies
l’ont été totalement à leur insu.
C’est le cas de la plupart des maladies professionnelles.

Remettre en cause la réparation forfaitaire ne
conduit nullement à remettre en cause le principe de la
présomption d’imputabilité qui constitue le
socle de la législation concernant la reconnaissance du
caractère professionnel de la maladie ou de
l’accident. Le principe de présomption
d’imputabilité, introduit dans la loi de 1898 (sur les
accidents du travail) puis dans celle de 1919 (sur les maladies
professionnelles), n’est pas lié au caractère
forfaitaire de la réparation. Il est adopté comme
critère fondateur de la qualification de l’accident ou
de la maladie comme accident du travail ou maladie professionnelle
et son inscription dans la logique d’assurance du risque
professionnel. Le niveau de la réparation relève
d’un arbitrage politique. C’est donc bien au
législateur de trancher enfin en faveur des victimes du
travail.

Dans une perspective de réparation
intégrale, il faut également préciser que
l’incapacité permanente doit prendre en compte
l’intégralité du préjudice
économique au sens large et pas seulement l’estimation
par un expert médical du handicap strictement physique.

2) Création d’une indemnité
d’attente en cas de perte ou de changement
d’emploi

Dans le cadre de la réparation des accidents
du travail et des maladies professionnelles, une indemnité
d’attente (représentant l’équivalent du
salaire) devrait être versée dès la cessation
des indemnités journalières et jusqu’à
ce qu’un reclassement ou une indemnisation intégrale
viennent effectivement compenser la perte de capacité de
gain entraînée par la maladie professionnelle.

Exposé des motifs

Les personnes exerçant une activité
salariée et atteintes de maladie professionnelle ou victimes
d’un accident du travail sont généralement
placées dans une position difficile au regard de
l’emploi. Le dispositif prévoyant la protection de
l’emploi des salariés accidentés du travail ou
atteints de maladie professionnelle (loi du 7 janvier 1981) ne
fonctionne pas. Inaptitude, démissions, licenciements sont
monnaie courante pour des personnes reconnues en maladie
professionnelle. S’il est logique de les protéger du
risque qui les a rendu malades, il est en revanche
particulièrement injuste que cette protection se fasse au
détriment de leur emploi, de leur qualification et de leur
revenu. Ceci est d’ailleurs précisé dans le
Code du travail (art L231-11) qui indique que " les mesures
concernant la sécurité, l’hygiène et la
santé au travail ne doivent en aucun cas entraîner de
charges financières pour les travailleurs ".

La perte d’emploi ou le déclassement
remettent gravement en question la sécurité
économique des victimes. Le niveau souvent dérisoire
des indemnisation est notoirement insuffisant pour compenser ce
préjudice qui doit être pris en considération,
surtout dans la mesure où la menace du chômage et de
la précarisation des emplois amplifie
l’insécurité liée à la survenue
d’une maladie professionnelle.

3) Suppression du seuil de 66,66% d’IPP pour
bénéficier du système complémentaire de
réparation des maladies professionnelles

A la fin de l’alinea 4 de l’article
L461-1, supprimer les mots " au moins égal à
un pourcentage déterminé "
et supprimer
l’article R461-8.

Exposé des motifs

Le système complémentaire de maladie
professionnelle (article 7-1 de la loi N°93-121 du 27 janvier
1993) ouvre droit à la reconnaissance dans deux cas de
figure, dont (article L461-1, alinea 4) le suivant pour lequel nous
demandons cette modification : lorsque la maladie n’est
prévue dans aucun tableau, mais " qu’il est
établi qu’elle est essentiellement et directement
causée par le travail habituel de la victime et
qu’elle entraîne le décès de celle-ci ou
une incapacité permanente "
supérieure
à 66,66% (art R.461-8)

Dans la mesure où la clause essentielle est
l’établissement de la preuve du lien direct et
essentiel entre le travail et la maladie, il paraît
totalement injuste d’y adjoindre la clause restrictive
d’un seuil de gravité ouvrant droit à
réparation.

Le rapport rendu en 1998 par le Professeur Got sur
l’amiante a confirmé le caractère arbitraire et
injuste de ce seuil, présenté comme un frein au bon
fonctionnement du système complémentaire dont
l’objectif est aussi de faire évoluer le
système des tableaux par la prise en compte de pathologies
liées au travail non prises en compte dans ce dernier.

4) Allongement de 2 ans à 5 ans de
l’ensemble des délais de prescription

Dans l’article L431-2 du code de la
sécurité sociale, le délai de prescription
doit être porté à 5 ans. Devraient être
dans le même temps supprimés les délais de 15
jours et de 3 mois figurant aux articles L 461-5 et R 461-5. Le
même délai de 5 ans devrait jouer pour l’action en
faute inexcusable.

Exposé des motifs

Les délais de prescription de 2 ans (article L
431-2) sont trop courts et ne permettent pas les
déclarations dans les temps réglementaires, soit
parce que la victime craint pour son emploi, soit parce que les
ayants droit après un décès mettent plusieurs
années avant de demander réparation. Le délai
de prescription devrait être porté à 5 ans. Les
victimes ou leurs ayants droit ne sont pas informés de leurs
droits par les caisses.

5) Création d’un délai
impératif entre reconnaissance et détermination de
l’IPP

Le délai entre la reconnaissance de la maladie
(ou la fin des indemnités journalières) et la
notification du taux d’IPP et de la rente ne doit pas
dépasser un mois.

Exposé des motifs

Les délais entre déclaration et
reconnaissance étant impératifs, c’est
désormais entre reconnaissance et indemnisation que se pose,
pour les victimes, le problème d’une inacceptable
attente d’indemnisation. Les caisses exigent un certificat de
consolidation considéré, pour les maladies graves,
par les médecins, comme inacceptable d’un point de vue
médical (un cancer peut-il être
déclaré médicalement
" consolidé " ?). Ainsi de longs
délais d’obtention du taux de rente conduisent
à une situation de fait où plus de la moitié
des malades atteints de cancer reconnus en maladie professionnelle
décèdent avant d’avoir obtenu
l’indemnisation.

Un délai impératif d’un mois devrait
être introduit dans la réglementation entre la
notification de la reconnaissance en maladie professionnelle (ou la
fin des indemnités journalières) et la fixation du
taux d’IPP et du taux de rente. En outre, toutes les maladies
à long temps de latence survenant chez les retraités
impliqueraient la suppression d’obligation d’un certificat de
consolidation, certificat qui n’était d’ailleurs pas
exigé quand il existait un régime dérogatoire
pour les pneumoconioses.

6) Le point de départ des prestations doit
être la date de première constatation médicale
de la maladie

Un article du CSS devrait fixer clairement le point
de départ des prestations dans la législation AT-MP,
en précisant que la maladie doit être
indemnisée à dater du jour de la première
constatation médicale.

Exposé des motifs

Depuis l’adoption de dispositions nouvelles
concernant le point de départ de la prescription (à
savoir la date à laquelle la victime est informée du
lien possible entre sa maladie et le travail) les caisses ont
adopté une stratégie qui limite les droits des
victimes à bénéficier d’une
indemnisation dès la survenue de leur maladie. En effet,
dans la pratique, les caisses adoptent comme point de départ
des prestations soit la date du CMI de maladie professionnelle,
soit la date de consolidation.

Cette stratégie est ici source
d’injustice pour les victimes qui ne sont pas
indemnisées à la mesure du temps durant lequel elles
ont souffert de leur maladie. Cela constitue également une
charge indue pour le régime général de
l’assurance-maladie. Dans le cas de maladies chroniques
graves et invalidantes cela peut constituer des charges
financières très importantes.

7) Aménagement de la prescription de
l’action en faute inexcusable de l’employeur

Compléter le dernier alinéa de
l’article L.431-2 comme suit : après les mots
la prescription de deux ans opposable aux demandes
d’indemnisation complémentaire visée aux
articles L. 452-1 et suivants est interrompue par l’exercice
de l’action pénale engagée pour les mêmes
faits
 ", ajouter les mots " ou de l’action en
reconnaissance du caractère professionnel de la maladie ou
de l’accident, pour laquelle ou pour lequel
l’indemnisation complémentaire est
demandée. "

Exposé des motifs :

Un arrêt de la Cour de Cassation du 20 avril 2000
contredisant un arrêt de la Cour d’Appel de Paris a
précisé que l’introduction d’une action
en reconnaissance du caractère professionnel d’une
maladie ne suspend pas le délai de prescription de
l’action en faute inexcusable de l’employeur.

On sait pourtant que la victime ou ses ayants droit attendent
que la reconnaissance en maladie professionnelle leur soit
notifiée par une lettre A.R. de la Caisse Primaire de
Sécurité Sociale avant d’engager une action
visant à faire reconnaître la faute inexcusable de
l’employeur.

L’action en faute inexcusable n’est que
l’accessoire de l’action préalable visant
à la prise en charge de l’accident du travail ou de la
maladie professionnelle.

Le législateur doit donc indiquer que le délai de
prescription concernant la faute inexcusable court à partir
de la notification de la reconnaissance en maladie
professionnelle.

8) Levée de la prescription en
matière de faute inexcusable dans le Code rural.

Compléter le II de l’article 40 de la loi
n°98-1194 du 23 décembre 1998 comme suit :
Par dérogation aux dispositions des articles L
431-2 et L 461-5 du code de la Sécurité sociale, les
droits aux prestations et indemnités dont les organismes de
sécurité sociale ont la charge en vertu des
dispositions du livre IV dudit code ainsi qu’en
vertu
 " ajouter les mots " 

de l’article 1149 et des articles 1148 et 1170 du code rural ...".

Exposé des motifs

Si le livre IV du code de la sécurité
sociale comporte la notion de faute inexcusable, celle-ci est
inscrite dans l’article 1149 du code rural. En y ajoutant cet
article, cela permet aux salariés du régime agricole
d’être concernés par cette réouverture de
droit en matière de faute inexcusable, au même titre
que les salariés du régime général,
mais aussi de clarifier les choses en ce qui concerne la
levée de la prescription pour la notion de faute
inexcusable.

9) Étendre le dispositif de cessation
anticipée d’activité aux travailleurs atteints
de plaques pleurales, tableau 30 paragraphe B.

Mesure budgétaire.

Exposé des motifs

La présence de plaques pleurales est la preuve
irréfutable d’une contamination par l’amiante.
Par rapport à la population générale, elle
signifie un sur-risque de pathologies graves et de
décès. Ce risque supplémentaire doit
être pris en compte.

Les " lésions pleurales
bénignes " du tableau n°30B sont
invalidantes ; elles peuvent évoluer, être
sévères et entraîner des incapacités
physiques importantes. Bénin ne signifie pas sans
souffrance. Le critère essentiel à prendre en compte
pour l’ouverture de ce droit, c’est d’abord la
réduction de l’espérance de vie.

Il y a d’ailleurs une incohérence et une
injustice flagrantes : des victimes relevant du tableau 30B
qui sont déjà malades se voient refuser un
accès à la cessation anticipée
d’activité, alors qu’il est pourtant
accordé - à juste titre - à des
salariés indemnes de toute pathologie, au seul motif
qu’ils ont travaillé dans des entreprises notoirement
utilisatrices d’amiante.

10) Extension de du dispositif de cessation
anticipée d’activité à d’autres
secteurs d’activité

Dans le 1 er alinéa du I de
l’article 41 de la loi n°98-1194 du 23 décembre
1998, après les mots " des établissements de
fabrication de matériaux contenant de l’amiante, des
établissements de flocage et de calorifugeage à
l’amiante, de construction et de réparation
navales "
, insérer les mots " de la
sidérurgie, des activités de réparation poids
lourds et automobiles, des plombiers chauffagistes
fumistes ".

Exposé des motifs

Secteurs où l’on retrouve de nombreuses
maladies professionnelles amiante.

11) Instaurer un planchér egal au smic brut
pour l’allocation de cessation anticipée

Mesure budgétaire.

Exposé des motifs

Actuellement, beaucoup de personnes qui pourraient
prétendre à cette allocation n’en profite pas
compte tenu que les montants proposés sont très
faibles. Une personne payée au Smic actuellement ne pourra
toucher que 80% de celui-ci. Le plancher actuel étant
imposé sous réserve de ne pas dépasser 80% du
salaire réellement perçu (même si
l’intéressé ne gagne que 3000
francs...).

12) SUIVI POST-PROFESSIONNEL

Vu l’énormité du retard pris pour
la mise en place du suivi médical post-professionnel
l’ANDEVA demande qu’une ligne budgétaire
exceptionnelle soit dégagée non seulement pour
le financement des actes mais aussi pour ouvrir les moyens
d’organisation, d’information, et d’accueil de
qualité,

Remarques sur l’article 20 du projet de loi

A propos de la levée de la prescription
pour les dossiers

de maladie professionnelle liée à
l’amiante

Si la rédaction du premier alinéa de
l’article 20, supprimant la date butoir permettant la
réouverture des droits des victimes de l’amiante et
donc la levée de la prescription de deux ans, est claire, la
rédaction de l’exposé des motifs l’est
beaucoup moins et comporte des lacunes.

Nous souhaitons que cet exposé des motifs soit
revu et qu’il fasse apparaître clairement le point
suivant :

- 
- toutes les victimes de maladies professionnelle dues à
l’amiante, dès lors que la première
constatation médicale de leur pathologie est établie
entre le 1 er janvier 1947 et le 29 décembre 1998,
peuvent faire valoir leurs droits aux prestations du livre IV de la
Sécurité sociale (reconnaissance en maladie
professionnelle, procédure en faute inexcusable de
l’employeur) ;
- 
- la référence à l’action en faute
inexcusable doit clairement apparaître.

Par ailleurs, s’agissant des constatations
médicales intervenant après le 29 décembre
1998, l’ANDEVA demande que le délai de prescription de
deux ans soit allongé à 5 ans, et que cette mesure
concerne l’ensemble des pathologies professionnelles, comme
il est demandé dans la plate-forme revendicative.

Enfin, depuis le vote de la loi de financement de la
Sécurité sociale pour 1999, la rédaction de
l’article 40 a donné lieu à des
interprétations diverses des tribunaux, s’agissant de
son application à la faute inexcusable de
l’employeur...