Association Nationale de Défense des Victimes de l'Amiante

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Préjudices des personnes exposées

21 septembre 2015
Auteur(e) : 

- Faire reconnaître un préjudice d’exposition fautive

- Dunkerque : la Normed responsable

- Arjuzanx : EDF 95 fois condamnée

- Caper Ardèche : avec les anciens de Basaltine

- Alstom Areva paiera

- Adevimap : 111 travailleurs de l’amiante aux prud’hommes

- Adeva Centre : préjudice d’anxiété en appel pour 14 anciens d’Everite

- AVAPA : 93 anciens des CMP dans l’attente


Faire reconnaître un préjudice d’exposition fautive

Par un arrêt du 3 mars 2015, la
Cour de cassation a restreint la
reconnaissance du préjudice
d’anxiété aux salariés dont l’établissement
est inscrit sur les
listes ouvrant droit à la cessation
anticipée d’activité (Acaata).

Elle a indiqué que le préjudice
d’anxiété prenait naissance à la
date de l’inscription de l’établissement
sur les listes.

Elle a enfin jugé qu’en cas de
défaillance de l’employeur, l’AGS
n’était tenu d’indemniser ce préjudice
que si l’inscription sur les
listes était antérieure à la liquidation
judiciaire.

Cette jurisprudence restrictive
exclut des salariés très fortement
exposés, qui ont pourtant subi à
l’évidence un préjudice lié à l’inhalation
évitable de fibres cancérogènes
sur leur lieu de travail.

Face à cette situation, une réflexion
a été entamée par l’Andeva
et ses cabinets d’avocats sur
la qualification juridique de ce
préjudice bien réel.

Elle a conduit à distinguer un
préjudice subjectif (l’anxiété ressentie
suite à la connaissance
du risque d’avoir une pathologie
grave parce qu’on a été exposé)
et un préjudice objectif (le fait
d’avoir été exposé à des fibres
cancérogènes par un employeur
dont la mission était de protéger
la santé de ses salariés).

Une série de procédures sont en
cours sur la reconnaissance de
ce préjudice d’exposition. Elles
iront sans doute en appel et en
cassation.

Un examen attentif
de la jurisprudence montre que
des arrêts favorables ont déjà
été rendus en cassation pour des
actions judiciaires ne concernant
pas l’amiante.


Dunkerque : la Normed responsable

Le 24 juillet dernier, le conseil des Prud’hommes
de Dunkerque a rendu 18 jugements qui considèrent
que la direction de la Normed est responsable
d’avoir causé un « préjudice d’exposition » à
l’amiante à ses salariés qui ont inhalé des fibres
cancérogènes sans être informés ni protégés.

Une violation du
Code du travail

Le conseil de
prud’hommes a jugé
que la société Normed
avait violé l’article
L 4121-1 du Code
du travail et manqué
à son obligation de
sécurité de résultat.

Un préjudice
« distinct du
strict préjudice
d’anxiété »

Le conseil a jugé
que « s’agissant du
risque amiante, le
non respect de cette
obligation de sécurité
engendre un préjudice
distinct du strict
préjudice d’anxiété ».

Il motive soigneusement
cette distinction
en soulignant qu’il
existe deux différences
 :

1) « le préjudice d’exposition
est contemporain
à cette exposition
alors que le
préjudice d’anxiété
apparait postérieurement
 »

2) « la nature des préjudices
est également
différente puisque le
préjudice spécifique
d’exposition présente
un caractère objectif
découlant du comportement
de l’employeur
alors que le
préjudice d’anxiété
est un simple trouble
psychologique par
nature
subjectif. »

41 jugements avaient
déjà été rendus,
le 25 mars dernier
par le conseil des
prud’hommes de
Dunkerque.


Arjuzanx : EDF 95 fois condamnée

Le conseil des prud’hommes a reconnu un
« préjudice d’exposition fautive » de l’employeur.

95 ex-salariés de
la centrale EDF
d’Arjuzanx ont eu
gain de cause devant
le conseil des
Prud’hommes de
Mont-de-Marsan
(Landes).

EDF ne pouvait
ignorer
le danger

Ils avaient engagé
avec le soutien de
leur syndicat CGT
une procédure pour
la reconnaissance du
préjudice d’anxiété.

Le conseil des prud’hommes a reconnu un
« préjudice d’exposition fautive » de l’employeur.

C’est finalement la
reconnaissance d’un
« préjudice d’exposition
fautive »
qui a été
obtenue, EDF ayant
sciemment exposé
ses salariés sans les
protéger à l’inhalation
de fibres d’amiante
cancérogènes, alors
qu’elle ne pouvait pas
ignorer la gravité du
danger.

Le montant des dommages
et intérêts est
fonction du nombre
d’années d’exposition
dans l’entreprise.

Il est en moyenne de
6000 à 7000 euros.

Frédéric Quinquis,
l’avocat des plaignants,
précise que le
tribunal a condamné
l’employeur à leur
remettre sous astreinte
une attestation
d’exposition ouvrant
droit à un suivi
médical post-professionnel
gratuit.

On compte à ce jour
37 décès chez les exsalariés
de cette centrale
depuis la fermeture
du site.


Caper Ardèche : avec les anciens de Basaltine

Le 18 mai dernier,
après plusieurs reports
d’audience,
les dossiers de
18 ex-salariés de
Basaltine ont été
plaidés devant les
prud’hommes d’Aubagne.
Les adhérents du Caper
Ardèche étaient
venus les soutenir.

Cette entreprise était
spécialisée dans le
béton. Elle ne figure
pas à ce jour sur
les listes ouvrant
droit à la cessation
anticipée d’activité
« amiante ».

C’est pourquoi ils ont
requalifié leur demande
en réclamant
la reconnaissance
d’un préjudice d’exposition
fautive.

L’inspecteur du travail
avait alerté plusieurs
fois la direction.

Elle ne peut
dire qu’elle ignorait le
danger qu’elle faisait
courir aux salariés.

Le délibéré sera rendu
le 22 octobre.


Alstom Areva paiera

Le conseil des prud’hommes de Bobigny a reconnu le
préjudice d’anxiété de 54 salariés.

Ils avaient été exposés
à l’amiante sur
le site de Saint-Ouen
qui fabriquait des
transformateurs électriques.
Ils y sont restés
jusqu’à la fermeture
en 2006.

Avec l’association
des anciens d’Alsthom-
Areva TSO,
ils ont poursuivi
l’employeur qui les a
délibérément exposés
à l’amiante pour
que soit reconnu un
préjudice d’anxiété,
lié à la peur d’avoir
une maladie grave,
suite à cette exposition.

Une vingtaine
de maladies liées à
l’amiante ont déjà été
reconnues, dont six
décès. 3 autres anciens
sont décédés
de l’amiante avant la
reconnaissance.

Alstom a déjà été
condamné 9 fois en
faute inexcusable.

Aux prud’hommes,
ils ont obtenu chacun
5.000 euros pour le
préjudice d’anxiété.

Pour Bernard Balestri,
membre actif de
l’association et de
l’Addeva 93, le point
positif c’est qu’Alstom
soit condamné :
« La justice reconnait
qu’Alstom nous a
exposés à ce poison
et que cela entraine
pour chacun d’entre
nous un bouleversement
de notre vie.
Mais 5000 euros,
c’est très inférieur à
ce que donne habituellement
la cour
d’appel de Paris ».

Ils feront appel pour
avoir une indemnisation
plus équitable.


Adevimap : 111 travailleurs de l’amiante aux prud’hommes

Le 18 juin, le Conseil des Prud’hommes
de Martigues examinait les dossiers de
111 salariés (dont trois sont décédés)
qui réclamaient l’indemnisation du préjudice
d’anxiété par les entreprises qui
les ont contaminés : Arkema Fos et
Port de Bouc, Arkema et Naphtachimie
Lavera, Poujaud... Ils étaient défendus
par le cabinet Teissonnière.

Depuis plus de 5 ans, le Conseil des
Prud’hommes de Martigues a toujours
condamné les entreprises fautives à
indemniser ce préjudice. L’Adevimap
estime que ces résultats sont des avancées,
même si la Cour d’appel d’Aix tire
les indemnisations vers le bas.


Adeva Centre : préjudice d’anxiété en appel pour 14 anciens d’Everite

La cour d’appel d’Orléans a confirmé
le préjudice d’anxiété et de bouleversement
des conditions d’existence pour
14 ex-salariés d’Everite à Descartes
(Indre-et-Loire), une usine d’amianteciment
propriété de Saint-Gobain.

Les Prud’hommes de Tours avaient
accordé 16.000 euros ; la cour d’appel
a baissé à 12 000 euros. L’entreprise
avait déjà été condamnée l’an dernier à
verser 12.000 euros à 21 ex-salariés.
On compte à ce jour 22 décès et plusieurs
dizaines de maladies professionnelles
reconnues.


AVAPA : 93 anciens des CMP dans l’attente

Le 16 juin, les dossiers de 93 ex-salariés
des CMP (Constructions métalliques
préfabrication) à Arles sont passés
devant le conseil de prud’hommes.
L’an dernier, 13 anciens des CMP
avaient eu gain de cause, mais aucun
n’avait eu la même somme et, à ce jour,
aucun n’a encore touché son dû.

Cette fois-ci, le conseil a renvoyé l’affaire
devant le juge départiteur qui devrait
statuer à l’automne. Jacques Fray,
le président de l’Avapa, regrette ce renvoi
et rappelle qu’il y a urgence : « depuis
2009, 15 de nos camarades sont
décédés de l’amiante. On vient encore
de perdre un collègue récemment ».


Articles tirés du Bulletin de l’Andeva N°49 (septembre 2015)