Association Nationale de Défense des Victimes de l'Amiante

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Monbazillac : contre la Mutuelle sociale agricole, notre ami Bruno a gagné !

10 janvier 2012

Le 13 octobre dernier des adhérents du Cerader se rassemblaient devant le Palais de Justice pour apporter leur soutien à Bruno, caviste chez Monbazillac, atteint de plaques pleurales dont la MSA refusait de reconnaître la maladie professionnelle. Le 9 décembre le tribunal lui a donné raison. René Vincent, le président du Cerader 24, nous parle de ce dossier assez inhabituel.

« Pour filtrer le vin, on utilisait de l’amiante en poudre » pour la filtration du vin »

Qui pourrait imaginer, en ouvrant une bonne bouteille de vin que des filtres en amiante ont pu être utilisés dans son processus de fabrication ?

René Vincent : Effectivement, on ne s’attendrait pas à trouver des victimes de l’amiante dans les caves viticoles. Et pourtant, ce matériau cancérogène a bien été utilisé pendant des années dans le processus de préparation de ce vin très réputé !

Comment cela se passait concrètement ?

Bruno travaillait à la cave viticole de Monbazillac. Depuis 1980, il était caviste, responsable de la filtration du vin.

A l’époque et jusqu’en 1997 on utilisait des filtres à plaques et à terre diatomée. 

Pour en améliorer l’efficacité, il mêlait à cette terre diatomée, des sachets d’amiante en poudre... sans protection ni information sur les dangers de ce produit. Plus tard, ce procédé a été interdit.

L’employeur appartenait au monde agricole. Est-ce qu’il ne pouvait pas ignorer que ces filtres étaient dangereux ?

Montbazillac était une entreprise importante. Elle connaissait bien les qualités industrielles de l’amiante . Elle ne pouvait pas ne pas connaître les dangers de ce poison.

La Mutuelle sociale agricole (MSA) a pourtant refusé de reconnaître la maladie professionnelle.

L’exposition professionnelle d’un salarié qui a manipulé pendant des années de l’amiante sous une forme aussi dangereuse que la poudre est absolument évidente.

La reconnaissance de sa maladie aurait dû être une simple formalité. Or tout se passe comme si l’on avait craint de nuire aux intérêts des producteurs de vins de la région et d’ailleurs, car le même mode opératoire a été appliqué ailleurs…

Avec l’aide du Cerader, Bruno a saisi le Tribunal des affaires de la Sécurité sociale (Tass).

L’amiante n’est plus du tout utilisé aujourd’hui. Comment avez-vous pu apporter la preuve de son utilisation dans le passé ?

Nous avons fait une recherche dans nos archives et dans celles de l’Andeva. Nous avons retrouvé d’autres procédés industriels où l’amiante était utilisé comme agent de filtration pour d’autres produits alimentaires.

A Bordeaux par exemple dans l’usine Lesieur, des salariés ont utilisé, eux aussi, des filtres en amiante pour filtrer l’huile.

Des actions judiciaires ont été engagées. Chez Lesieur, la faute inexcusable de l’employeur avait déjà été reconnue.

Le tribunal vous a finalement donné raison. La maladie sera reconnue.

Oui, l’arrêt a été rendu le 8 et a été connu le 9 décembre. La reconnaissance de sa maladie lui ouvre maintenant le droit de bénéficier de la cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante. Il va pouvoir partir à 56 ans.
Ce jugement a été bien relayé par les medias. Nous avons eu droit à FR3, France Bleu, Sud Ouest.

Dans le monde agricole aussi, l’amiante fait des ravages. L’un de nos adhérents, qui est décédé de ce poison, était dépanneur de matériels agricoles !


Article tiré du Bulletin de l’Andeva No38 (janvier 2012)