Association Nationale de Défense des Victimes de l'Amiante

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La Conférence de Kiev

19 avril 2013

NOVEMBRE 2012 : La conférence de Kiev

Officiellement, ce sont le Ministère de la santé, l’Académie Nationale des sciences médicales de l’Ukraine, l’Académie des sciences médicales de Russie et l’Institut de recherche sur la santé au travail (FSBI) qui ont organisé les 21 et 22 novembre 2012 une conférence internationale intitulée « Amiante chrysotile : gestion et évaluation du risque ». En fait ce sont les industriels de l’amiante qui en furent les vrais organisateurs.

Des têtes bien connues

On retrouvait dans cette conférence les experts de l’industrie de l’amiante russe, N. F. Izmerov et E.V. Kovalevskiy, les médecins travaillant pour l’institut du chrysotile brésilien, Terra Filho, Ericson Bagatin et Ishii Zamatoro, Vivek Chandra Rao de l’industrie de l’amiante-ciment en Inde et quelques uns des escrocs qui émargeaient régulièrement auprès de l’institut de l’amiante canadien comme R. Nolan, David Bernstein et Jacques Dunningan.

Bon pour la Santé ?

Le premier exposé, suivant l’ouverture officielle de la conférence, concernait la Convention de Rotterdam et l’inclusion de l’amiante chrysotile dans la liste des produits dangereux.
Le programme et la liste des participants rendaient transparent le but : affirmer que le chrysotile, tel qu’il est utilisé aujourd’hui est bon pour la santé, et qu’il est donc justifié que la Russie, et peut-être l’Ukraine s’oppose à son inscription. La chercheuse du Centre international de Recherche sur le Cancerinvitée et les deux invitées de l’institut de médecine du travail de Pologne – pays qui planifie l’éradication de l’amiante – se sont probablement trouvées un peu isolées.

Il était urgent... ...de ne pas conclure

Sans surprise, la Conférence a adopté une résolution concluant que les données scientifiques actuelles ne permettent pas de d’affirmer que l’amiante chrysotile soit cancérogène et qu’il serait donc prématuré d’inscrire l’amiante chrysotile sur la liste de produits dangereux.
L’organisation et le contenu de la conférence sont clairement grotesques si on les met en regard des conclusions du Centre international de Recherche sur le Cancer, de l’Organisation Mondiale de la Santé, du Bureau International du Travail, de l’Organisation Mondiale du Commerce et de la Banque Mondiale et des positions des sociétés d’épidémiologie du monde entier et de l’Union internationale contre le cancer.
Mais il ne faut pas oublier que ces arguments ont laissé insensible le gouvernement canadien durant des décennies.


Le Centre International de Recherche sur le Cancer s’est-il fait piéger par les industriels russes ?

Les publications du Centre International de recherche sur le Cancer, le CIRC (IARC en anglais) sont sans ambiguïté : « Toutes les formes d’amiante sont cancérigènes pour l’homme », plus précisément l’ARC établit que le nombre de cancer du poumon causé par les variétés d’amiante est au moins deux fois supérieur au nombre de mésothéliomes.
Il n’existe en Russie ni registre des cancers ni données épidémiologiques fiables ; il semble naturel que l’IARC ait cherché à développer et élaborer des données. Le problème est évidemment le choix de travailler avec les industriels de l’industrie minière.En particulier une étude de cohorte sur des travailleurs est menée conjointement.
De plus l’IARC a participé à une conférence à Kiev, en novembre 2012, organisée par le ministère de la Santé de Russie et les industriels russes, le but annoncé de cette conférence étant d’émettre un avis « scientifique » négatif sur l’inscription de l’amiante chrysotile sur la liste des produits dangereux prévue par la Convention de Rotterdam.<br<
Un des problèmes est qu’évidemment, les industriels russes et leur institut du chrysotile présentent les conclusions de la conférence de Kiev comme ayant l’aval du CIRC (ce qui est faux) et suggèrent aux pays d’Asie d’attendre le résultat des études menées avec le CIRC pour savoir si le chrysotile est dangereux ou pas.


L’ARGENT N’A PAS D’ODEUR

Le marché juteux
de l’escroquerie scientifique

L’image des chercheurs est, à juste titre, celle de scientifiques menant plutôt une vie d’ascète, dédiée à la difficile recherche de la vérité. Ils travaillent en général dans des universités et organismes publics.
Mais une catégorie de « chercheurs » très particuliers s’est développée autour du commerce de l’amiante.
Dès les années 50, l’industrie minière canadienne a commencé à solidement rémunérer quelques médecins épidémiologistes et à partir de la fin des années 70 un certain nombre de compagnies américaines en proie à des milliers de procès en indemnisation ont calculé qu’il serait plus rentable de financer des recherches qu’elles pourraient ensuite produire devant les tribunaux. David Bernstein, Jacques Dunnigan, Dennis Paustenbach sont des noms souvent cités par l’industrie de l’amiante canadienne qui a payé pour cela
.
Ces mêmes « experts » douteux émargent aussi auprès de compagnies américaines.
On les retrouve un peu partout ailleurs pour défendre l’amiante. Ainsi Bernstein et Dunnigan ont défendu l’amiante chrysotile devant le Tribunal Suprême Brésilien (août 2012), à l’invitation de l’institut brésilien du chrysotile et à la conférence de Kiev (novembre 2012).
Ils préfèrent probablement les dollars aux réais et aux roubles mais l’argent n’a pas d’odeur.


Article paru dans le bulletin de l’Andeva n°42 (avril 2013)