Association Nationale de Défense des Victimes de l'Amiante

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Amiante dans les écoles : Yonne, Limousin, Cherbourg

25 juin 2019

- Tous les décideurs de l’Yonne ont reçu une lettre de l’Addeva !
- Limousin : Presque tous amiantés
- Ecoles, bâtiments publics : L’Adeva Cherbourg s’engage
- Un site Internet, Urgence Amiante Ecoles : "Nous voulions que ce site soit un outil pour les enseignants et parents d’élèves qui se heurtent au déni de l’administration


Tous les décideurs de l’Yonne ont reçu une lettre de l’Addeva !

En lisant les chiffres du rapport 2016 de l’Observatoire de la Sécurité dans les établissements scolaires, Patrick, le président de l’Addeva Yonne, a bondi :
- 85% des établissements scolaires ont au moins un bâtiment construit avant 1997 et sont susceptibles de contenir de l’amiante.
- 30% des écoles primaires et maternelles n’ont pas de Dossier technique amiante (DTA).
L’Addeva devait obtenir des décideurs un état des lieux dans l’Yonne.

Patrick prépare des modèles de lettres. Marie-Odile, secrétaire de l’association s’occupe de la logistique : la recherche des adresses, l’impression, la mise sous enveloppes et l’expédition.

Plus de 700 courriers envoyés

La liste des destinataires est longue comme un jour sans pain. Il y a l’Agence régionale de Santé (ARS), le Préfet, le recteur de Dijon, l’Inspection académique, le président du Conseil régional, les députés et sénateurs locaux...

Mais aussi les 42 conseillers départementaux de l’Yonne, les présidents des 14 communautés de communes ou d’agglomération, les 279 maires ayant une école dans leur commune, les 376 directeurs d’écoles, sans oublier l’inspectrice du travail...
Marie-Odile n’a économisé ni son temps ni son énergie, n’hésitant pas à coller des enveloppes à domicile, jusqu’au bout de la nuit...

Les premières réponses arrivent.

Le Conseil général de l’Yonne informe l’Addeva :
- « Il n’y a plus, sur le parc immobilier des collèges, de matériaux amiantés de la liste A » (flocages, calorifugeages, faux plafonds).
- Lors des travaux de réhabilitation d’envergure, « il est systématiquement privilégié le retrait des matériaux amiantés plutôt que l’encapsulement, même si cela est plus onéreux à court terme ».
- « Une mise à jour des DTA [sera réalisée] avant le premier février 2021 ».
- Il sera tenu « un tableau de bord récapitulatif des matériaux amiantés restant au sein des collèges. »

La Direction des services techniques de Sens écrit à l’Addeva : « En 2017, nous avons réalisé les diagnostics techniques amiante (DTA) de nos 19 établissements scolaires. Deux sont exempts d’amiante. Les 17 autres présentent de l’amiante, principalement sous la forme de dalles de sol. Aucune amiante de type friable n’a été détectée. »

Deux établissements présentant des dalles de sol dégradées seront « désamiantés dès cet été.

Cinq autres « feront dès cette année l’objet de mesures conservatoires de type recouvrement des zones faiblement dégradées pour éviter une dégradation plus importante »

« Les DTA étant trop lourds pour un transfert par courrier, je vous prie d’adresser un mail [à la direction technique] afin qu’un lien de téléchargement vous soit envoyé. »

L’attachée parlementaire d’une sénatrice a proposé un rendez-vous début juin avec l’association.

Une directrice d’école a pris contact, inquiète de la présence de dalles en vinyle-amiante dans la salle de motricité, où les tout petits font la sieste.

L’Addeva a aussi appris que le maire de Pontigny envisageait de confier des travaux de désamiantage à du personnel de la mairie non habilité. Il devrait savoir qu’un maire de la région vient d’écoper de 10 000 euros d’amende et d’un an de prison avec sursis pour un chantier de retrait confié à des salariés qui n’étaient ni formés ni protégés.

« Monsieur le Directeur,
Madame la Directrice, »

(extraits de la lettre aux chefs d’établissements)

« Il existe un document (DTA) dossier technique amiante qui devrait être à disposition dans votre établissement, que vous devez communiquer aux enseignants comme aux parents d’élèves et personnels exposés. »

« Si vous n’avez pas ce document mis à jour, faites en la demande avec l’aide du document joint dans ce courrier. »

Il est primordial pour l’Addeva Yonne, de faire de la prévention, afin de ne pas retrouver de nouvelles victimes, que ce soit des élèves ou les professeurs ainsi que les personnels qui y sont exposés tous les jours depuis des années.

L’Addeva Yonne est à votre disposition pour de plus amples renseignements et vous aider pour la lecture du DTA. »(...)


Limousin : Presque tous amiantés

Le Populaire du Centre a enquêté sur l’amiante dans les établissements scolaires en Limousin.

La lecture des DTA montre que presque tous les lycées et collèges comportent encore des matériaux contenant de l’amiante :
- 278 lycées sur 295 en Nouvelle-Aquitaine,
- 42 lycées sur 43
en Limousin,
- 34 collèges sur 34 en Haute-Vienne.

A Limoges, toutes les écoles - il y en a une soixantaine - ont encore des matériaux contenant de l’amiante. Selon le Département, il faudra au moins quinze ans pour que les collèges soient définitivement débarrassés de ces fibres cancérogènes.

Presque tous les chantiers de rénovation prévoient un désamiantage.

Les travaux se font le plus souvent en période de vacances scolaires, hors de la présence des élèves et du personnel.

La facture peut-être très salée. « Le désamiantage coûte entre 10% et 20% du montant total d’un chantier de rénovation », explique le directeur de l’architecture et des bâtiments à la Ville de Limoges.


L’Adeva Cherbourg s’engage

L’association a décidé de prendre à bras-le-corps le problème de l’amiante dans les écoles et les bâtiments publics. Elle s’est adressée aux autorités locales pour obtenir un état des lieux et un suivi des mesures correctives.

Combien d’établissements n’ont pas fait
de dossier technique amiante ?

Le 28 mars 2019, l’Adeva Cherbourg a rencontré le vice-président de la région Normandie.

Le 5 avril, elle a rencontré les directeurs techniques de Cherbourg.

Elle a prévu de contacter le département de la Manche pour les collèges.

Un vaste parc immobilier

Le parc immobilier de la ville de Cherbourg est aussi important que celui de la ville de Rennes.

Il y a 955 écoles et bâtiments publics répartis sur 450 sites.

Trois directions les ont en charge pour l’entretien, la maintenance et l’énergie, les études et travaux.

Un logiciel pour les DTA

Un appel d’offre a été lancé pour la réalisation d’un logiciel qui recensera les bâtiments publics du patrimoine pour assurer leur suivi et la gestion des dossiers techniques amiante (DTA) : diagnostics, repérages, mesures d’empoussièrement, mesures correctives. L’opération devrait débuter à l’automne.

DTA : les premiers constats

La situation dans les établissements scolaires*
- 114 ont un DTA
- 17 n’en ont pas (alors qu’il aurait dû être fait)
- 10 sont sans amiante (bâties après l’interdiction en 1997).

Sur les 114 DTA réalisés, 67 ont montré une présence d’amiante, et 47 n’en ont pas trouvé.

Autres bâtiments en activité :
- 800 Bâtiments, 40 CCAS, EHPAD, Foyers logements et accueils du public.
Sur l’ensemble des bâtiments :
- 526 ont un DTA soit 55% du parc immobilier.
- 338 n’en ont pas soit 35% du parc immobilier.
- Les autres (9,2%) ne sont pas concernés car ils ont été construits après l’interdiction de l’amiante en 1997.

Un planning de mesures correctives

Un retour d’expertise est prévu pour décembre 2019.

Des mesures d’empoussièrement sont programmées de novembre 2019 à février 2020.

L’élaboration des DTA et la mise en place de l’outil numérique de gestion sont prévues d’ici février 2020.

L’Adeva Cherbourg devrait être tenue informée de l’avancement du programme de mise à jour.


Un site Internet, "Urgence - Amiante - Ecoles"

En janvier 2019, Emmanuel Roy et des profs du lycée Brassens de Villeneuve-le-Roi ont lancé le site Internet « Urgence - Amiante - Ecoles ». Dans un contexte marqué par une série de luttes locales contre l’amiante dans l’Éducation nationale sur ce thème, leur initiative a eu un écho important.

Ils nous expliquent ici quelles sont leurs motivations, leurs difficultés et leurs projets d’avenir.

Emmanuel Roy

Réalisateur, auteur du film « La part du feu ».
Son père, enseignant puis proviseur, est décédé d’un mésothéliome.

Cyril Verlingue

Prof de français au lycée Brassens, où des enseignants ont porté plainte pour mise en danger de la vie d’autrui.

"Nous voulions que ce site soit un outil pour les enseignants et parents d’élèves qui se heurtent au déni de l’administration"

Pourquoi avoir créé ce site ?

Cyril : Il y a depuis des années des luttes contre l’amiante dans l’Éducation nationale. Elles se heurtent souvent à une fin de non recevoir des pouvoirs publics. C’est le constat qu’avaient fait les profs du lycée Georges Brassens à Villeneuve-le-Roi.
Notre but est d’apporter aux enseignants et aux parents d’élèves un outil pour connaître leurs droits, échanger des expériences et surmonter leur isolement. Il est aussi de faire pression sur les pouvoirs publics.

Emmanuel : Nous avons évoqué le projet en décembre 2018 avec les profs du Lycée Brassens et l’Addeva 93. Et nous nous sommes mis au travail.

Comment le site a-t-il été lancé ?

Cyril : En janvier 2019, nous avons mis en ligne le site Internet et un groupe Facebook. Il y a eu une relance de la question de l’amiante à l’école dans les médias. Le journal Libération a fait un dossier de six pages.

Emmanuel : Libé a aussi publié une tribune libre du collectif Urgence amiante écoles, appelant à lancer une enquête citoyenne pour forcer les autorités à agir.

Elle insistait sur l’urgence d’établir un état des lieux détaillé et exhaustif de l’amiante dans tous les établissements scolaires pour éviter de mettre en danger les élèves et les personnels.

Il rappelait que tout parent d’élève, tout membre du personnel doit pouvoir accéder librement et sans restriction au dossier technique amiante (DTA), conformément à la loi. 

Cet appel a été soutenu par l’Andeva, l’AVA, Ban Asbestos France, la Cavam, le Comité anti-amiante Jussieu, le Réso a+, et l’association Henri Pézerat.

Que s’est-il passé ensuite ?

Cyril : Nous avons reçu une série de témoignages qui révélaient une méconnaissance de la réglementation et une difficulté à trouver des informations...

Emmanuel : Il y a un énorme travail d’information et de sensibilisation à faire. Nous leur donnons des outils pour s’opposer au déni de l’administration : les statistiques de l’ONS, la réglementation, les droits du personnel...

Cyril : ll nous est difficile de répondre à toutes les sollicitations. Nous avons tous les deux une activité professionnelle. Il y a beaucoup d’échanges. Cela demande beaucoup de temps et d’énergie.

Emmanuel : Nous aidons ceux qui nous contactent, mais nous ne voulons pas nous faire passer pour des experts.

Cyril : La question des DTA est essentielle. Peu de collègues le demandent. Peu de ceux qui le demandent l’obtiennent. Ceux qui l’obtiennent s’aperçoivent souvent qu’il est incomplet, imprécis et n’est pas remis à jour.

Notre but est de construire un réseau qui permette d’échanger des connaissances et de partager des expériences.

https://urgence-amiante-ecoles.fr/


Articles du Bulletin de l’Andeva No 60 (juin 2019)